Nous avons rencontré Sabrina Halde et Jean-Vivier Lévesque du groupe québécois Groenland, quelques heures avant leur concert au Printemps de Bourges. L’occasion de revenir sur leur chemin musical déjà parcouru ainsi que leurs projets et envies futurs.
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> Tout à l’heure, vous allez jouer au Printemps de Bourges dans le cadre des iNOUïS, qui est un beau tremplin musical. Comment avez-vous abordé le concert ?
Sabrina Halde : En fait, nous on essaye de ne pas stresser et de ne pas se mettre la pression pour faire exactement la même chose que d’habitude avec la même énergie, sans trop penser aux conséquences.
Jean-Vivier Lévesque : Je pense que ne pas trop se préparer, c’est la meilleure façon de faire un bon show. En fait, je n’ai appris qu’aujourd’hui qu’on faisait les iNOUïS ! Mais je suis très content d’être ici.
Sabrina : Oui vraiment, on est très chanceux !
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> Vous avez déjà joué en France et votre première date française était au festival Off-Courts de Trouville en 2013. Est-ce que vous vous en souvenez ?
Sabrina : Oui ! Ça a vraiment été un beau moment.
Jean-Vivier : Quelque chose de vraiment génial. Je ne pense pas que ça soit un festival que tout le monde connaisse en France, mais c’est incroyable. C’est un vrai festival de création.
Sabrina : C’est au bord de la mer, et l’équipe était tellement chaleureuse. On était accueillis comme des rois, on avait un appartement…
Jean-Vivier : Et puis, on n’avait encore jamais fait de la musique de film.
Sabrina : On avait comme un petit studio et les gens venaient cogner pour nous demander une piste, alors on allait chercher les cordes et tout. C’était drôle.
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> Après le Printemps de Bourges, vous allez rejouer en France le 12 mai aux Trois Baudets. Vous avez hâte ?
Sabrina : Oui, vraiment ! Ça va être la première fois qu’on jouera à Paris.
Jean-Vivier : Tout le monde a l’air de dire que c’est un chouette endroit. On peut dire que c’est notre premier vrai concert officiel en France, ce qui est pas mal aujourd’hui ! Et dès demain on sera en Allemagne.
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> Oui, vous bougez beaucoup. Ce n’est pas un peu fatigant ?
Sabrina : Là on commence juste, donc ça va, mais on verra comment on se trouvera dans un mois ! (rires)
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> Les concerts en France sont différents de ceux au Québec ?
Sabrina : Je pense que la seule différence, c’est que les gens nous connaissent moins. J’ai l’impression qu’il y a beaucoup plus d’écoute. Ils sont peut-être moins dynamiques. Mais en même temps ça dépend des endroits…
Jean-Vivier : Je pense que tous les publics sont différents. On ne connaît pas encore vraiment le public français, on va voir. Mais le public allemand est différent aussi. Il faut s’adapter à tous les publics. C’est un beau défi pour nous de venir en Europe, et niveau pression, c’est à ça que je pensais le dernier mois avant de venir. Je me demandais comment ça allait se passer, quel genre de public allait venir. On est tellement habitués à faire des spectacles au Québec que là-bas c’est devenu très facile pour nous. Alors qu’ici, on recommence un peu au départ.
Sabrina : Mais c’est cool parce qu’au moins, on ne refait pas les mêmes concerts tout le temps. Ça fait une différence qui nous fait travailler un peu ! (rires)
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> Oui, parce qu’en plus de la France et de l’Allemagne, vous allez aussi jouer au Royaume-Uni, à Amsterdam… C’est une belle tournée !
Sabrina : Oui, on est chanceux, c’est cool ! On l’a attendue quand même cette tournée, parce qu’on voit avec les moyens qu’on a. Ça fait deux ans qu’on a sorti l’album au Québec et on avait hâte de se promener un peu en Europe.
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> Cet album, vous l’avez ressorti dans une version deluxe avec trois nouveaux titres dont un remix d’une de vos chansons. Pourquoi cette idée du remix ?
Sabrina : Je pense que c’est plus pour faire un petit cadeau, pour ne pas ressortir exactement le même album.
Jean-Vivier : Oui et parce qu’on avait déjà ce remix aussi. Rich Aucoin, c’est quelqu’un avec qui on a joué au Québec, c’est un artiste qu’on aime beaucoup. Donc on s’est dit pourquoi pas.
Sabrina : En fait cet artiste, je l’avais connu en Nouvelle-Ecosse quelques années avant Groenland.
Jean-Vivier : Vous allez sûrement le voir en France un jour.
Sabrina : Je crois qu’il est même déjà venu. Il fait des spectacles incroyables ! C’est explosif !
Jean-Vivier : Il anime les foules. Il y a même un parachute dans ses concerts !
Sabrina : Et des confettis aussi.
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> Du coup, vous retenterez peut-être une nouvelle fois l’expérience du remix ?
Sabrina : Oui, certainement.
Jean-Vivier : On a souvent des gens qui veulent nous remixer. Surtout cette chanson, Immune, parce qu’elle est assez propice à ça. Il y a des gens qui nous écrivent des fois pour nous demander « est-ce que ça vous dérange si je remixe votre chanson ? », et nous on est là « ok, amuse-toi ! ».
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> C’est cette chanson aussi qui a servi pour le clip. Pouvez-vous nous expliquer comment s’est passée la réalisation ?
Jean-Vivier : C’était très essoufflant, on court tout le long du clip ! On n’arrêtait pas de monter les montagnes en courant…
Sabrina : Je me souviens m’être levée à 2h du matin et avoir couru, couru, couru… toute la journée. Il fallait aussi courir après le soleil parce qu’il se couchait mais il fallait qu’on termine l’histoire et il nous manquait la fin. Finalement, on avait quand même trouvé une autre fin. Mais sinon ça a été une bonne collaboration avec Roméo & Fils. Ils avaient trouvé une histoire qui les intéressait, on a fait un brainstorming ensemble et puis on a trouvé cette idée.
> Vous avez déjà commencé à travailler sur un deuxième album, c’est ça ?
Sabrina : Oui, exactement ! On en est encore au début, à la première étape pour trouver des idées originales, la forme des chansons. Je pense que ça va rester dans l’esprit du premier album, mais peut-être avec d’autres instruments car on va essayer de ne pas faire les mêmes choses, sans pour autant aller vers quelque chose de complètement différent. On veut rester assez proches de notre esprit.
Jean-Vivier : On a quand même des chansons qui sont un peu différentes. On est surpris par ce que l’on sort des fois.
Sabrina : Et parfois, l’arrangement va tout changer.
Jean-Vivier : On va un peu dans d’autres zones…
Sabrina : En fait, c’est très vague ce que l’on dit ! (rires)
Jean-Vivier : Mais c’est ça un album, tu ne le comprends pas vraiment jusqu’à la toute fin où tu fais « waouh ! C’est ça qu’on faisait ! ».
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> Votre premier album est sorti il y a déjà deux ans, vous avez continué à gagner en expérience depuis, avec les concerts. Est-ce que vous avez commencé à aborder ce deuxième album sous un autre angle du coup ?
Jean-Vivier : Je pense que c’est beaucoup nos influences musicales qui ont changé. On essaye de toujours rester un peu à jour sur ce qui sort. On n’est plus dans la même place que pour le premier album.
Sabrina : Le premier album est très indie… En même temps, on écoute tellement de choses comme du hip-hop…
Jean-Vivier : Mais l’expérience des concerts n’a pas tant changé notre façon de faire car on se rend compte qu’on revient aux sources. En composition ou en live, ce n’est pas du tout la même chose.
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> Vous composez tous les deux je crois. Mais après, comment cela se passe quand vous présentez vos idées au reste du groupe. Est-ce qu’ils remodifient ce que vous avez fait ?
Jean-Vivier : Oui, il y a même beaucoup d’ajouts !
Sabrina : Après ça, on va chercher notre ami batteur qui a une bonne oreille je pense pour les arrangements. Et puis il joue plein d’instruments donc parfois c’est vraiment fun de changer les rôles. A partir de là, on va chercher les autres.
Jean-Vivier : Nous on ne prépare pas tout. On prépare seulement la forme, la voix et l’émotion pure et on s’amuse avec.
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> Pourquoi avoir décidé de commencer ce travail tous les deux ? Est-ce que c’est parce que c’est plus facile à gérer qu’à six ?
Jean-Vivier : Le groupe est parti à deux et après c’est resté comme ça.
Sabrina : J’ai l’impression qu’on s’entend vraiment bien tous les deux musicalement.
Jean-Vivier : Et puis il faut qu’il y ait une direction dans un groupe. Quand tout le monde sait où est sa place dès le début, tout le monde est content.
Sabrina : C’est vrai parce que sinon ça part dans tous les sens. Les autres sont un peu plus rock par exemple. Je pense que si on écoutait tout le monde, je deviendrais complètement folle ! J’ai besoin de commencer par quelque chose de tranquille.
Jean-Vivier : On a essayé un peu de faire autre chose que ça, mais au final, tout le monde était plus perdu et malheureux qu’autre chose.
> Est-ce que vous êtes très influencés par le lieu dans lequel vous enregistrez ? Parce que j’ai vu que dans le cadre du festival Quartiers d’Hiver, vous avez enregistré une session dans une petite cabane au bord d’un lac.
Sabrina : Oui, sur un lac gelé dans une petite cabane de pêche ! C’était incroyable !
Jean-Vivier : Pour les français, c’est comme le rêve ! Un lac gelé avec un trou dans la glace pour pêcher et une petite cabane (rires)
Sabrina : Oui, c’est un peu les clichés que vous vous imaginez du Canada ! (rires) Avec la fourrure et les skis doo !
Jean-Vivier : Non c’était vraiment fun. On a fait une petite performance dans une cabane qu’on avait chauffée.
Sabrina : On avait préparé des chansons sans les cordes parce qu’il faisait trop froid pour ça. Il faisait quand même vraiment très froid… -30/-40.
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> Il y a d’autres endroits comme ça où vous aimeriez enregistrer ?
Sabrina : On avait fait à Toronto une performance dans une serre. Mais c’était juste une prise parce qu’on n’avait pas vraiment le droit d’être là, ils nous avaient dit « ok » mais il fallait se dépêcher. Mais au final, il y avait plein d’enfants, de familles… C’était vraiment cool comme mouvement spontané !
Jean-Vivier : Un moment spontané, quand ça marche, c’est génial. Enfin, ça peut aussi ne pas marcher, les gens peuvent être froids…
Sabrina : Mais sinon, on n’est pas tant transportables que ça, parce qu’on a toujours besoin d’un piano.
Jean-Vivier : Ou sinon, dans les pyramides, ça peut être cool !
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> Les pyramides, c’est une idée originale ! Mais c’est vrai que musicalement, ça doit faire une résonance qui peut être assez belle…
Sabrina : Oui ! C’était cool justement dans la petite cabane de pêche parce que c’était tellement bizarre il faisait chaud à l’intérieur et super froid dehors. Et au niveau son, ça changeait vraiment.
Jean-Vivier : On a souvent dû arrêter parce qu’il y avait trop de skis doo qui faisaient du bruit ! (rires)
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> Et puis jouer dans un petit endroit comme la cabane, ça doit permettre de se regrouper, de retrouver une intimité au sein de groupe, non ?
Sabrina : Oui, ce genre d’expérience en groupe, c’est fun !
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> Et à part une contrainte de lieu, vous aimeriez tester d’autres contraintes ?
Sabrina : On nous demande souvent de jouer à moins, parce qu’on est six dans le groupe. Mais on ne peut pas vraiment jouer à moins parce qu’on a besoin des cordes. Pour nous, ça fait vraiment partie du son.
Jean-Vivier : Peut-être jouer tout nus… (rires)
Sabrina : On avait joué aussi une fois en Allemagne dans un lit le matin, c’était assez drôle !
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Merci à Jean-Vivier et Sabrina de Groenland pour cette conversation dans la bonne humeur !
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Photos © Laure Clarenc