Lors du Printemps de Bourges, nous avons rencontré le duo Chill Bump pour discuter un peu plus de son projet musical.
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> Vous jouez au Printemps de Bourges ce soir. Comment vous sentez vous ?
Bien !
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> Vous êtes de la région alors est-ce que vous avez déjà eu l’occasion de jouer au Printemps de Bourges ?
On est de la région oui, mais on n’a jamais joué au Printemps de Bourges. On a déjà joué une fois à Bourges par contre.
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> Est-ce que vous pensez qu’il y a une dynamique musicale particulière dans la région Centre ?
Sur la région c’est difficile pour nous de dire. Après sur Tours oui, quand on rentre un peu dans le réseau et dans le milieu de la musique tourangelle, on se rend compte qu’il y a vraiment beaucoup de gens qui font ça professionnellement et bien. Il y a des points de repère comme Radio Béton, avant il y avait Le Bateau Ivre… A Tours, c’est assez développé, il y a beaucoup d’artistes, de groupes, et des styles très variés. Après sur la région sincèrement, je pense qu’on n’a pas encore assez d’expérience pour te dire. Sinon, il y a aussi des écoles de jazz comme Tous En Scène. Et Radio Béton organise aussi des festivals. Ce qui est bien, c’est que c’est petit donc quand tu es dans le réseau, tu te retrouves un peu avec tout le monde dans les mêmes endroits. Du coup, on sympathise plus facilement qu’à Paris où tu peux, je pense, vivre toute une vie sans jamais rencontrer des gens du réseau.
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> Le fait de pouvoir rencontrer des gens de styles variés, ça vous influence dans votre musique ?
Humainement en tout cas, oui. Après, on a été amenés à collaborer avec ODG, on a fait un remix pour Biga aussi, tout ça ce sont des gens de Tours. Il y a énormément de personnes qu’on connait avec qui, je pense, on ne fera jamais de musique ensemble, mais qui restent quand même de bons amis comme EZ3kiel. Enfin on ne dit pas qu’on ne fera jamais rien avec eux, mais dans l’immédiat ce n’est pas prévu. On verra bien.
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> En parlant de collaboration, vous avez remixé un titre de Chinese Man sur leur dernier EP. Comment ça s’est passé ? Je crois que vous les avez rencontrés en concert, non ?
Oui à Clermont-Ferrand on avait fait leur première partie. C’était au mois d’octobre je crois. On les a croisé très rapidement après le concert, et quelques temps après ils nous ont demandé si ça nous tentait. On connaissait déjà Youthstar, un des rappeurs avec Taiwan MC. On s’était déjà vus sur Bordeaux via des amis en commun, donc ça a aussi facilité la rencontre.
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> Ils vous ont complètement laissé carte blanche pour le remix ?
C’est ça, par contre ils nous ont donné un morceau, on n’avait pas le choix entre plusieurs. Et après oui, ils ont juste attendu qu’on leur envoie quelque chose. Ce qu’on a fait assez rapidement d’ailleurs. On n’avait pas trop de temps à ce moment-là pour prendre autant de temps que d’habitude pour faire des morceaux. C’est-à-dire que d’habitude on prend peut-être même trop de temps pour faire des morceaux, pour peaufiner en tout cas. On est assez perfectionnistes là-dessus. Alors que là, on avait une date limite pour le finir, du coup c’était autre chose, ça a un peu stimulé la création. Mais c’était cool. Et le fait que ça soit sur disque on est à tout jamais gravé dans l’histoire ! (rires) Enfin voilà, c’était cool et surtout qu’on ne sait pas comment ça s’est passé après, mais il y a peut-être des remixes qu’ils ont demandé à d’autres artistes et qui n’ont peut-être pas fini sur le disque. On imagine qu’ils ne mettent pas tout, il y a peut-être des choses qui ne leur plaisent pas. Donc pour nous, ça veut dire que c’est validé. Déjà que c’est cool, mais que ça soit en plus sur un disque, c’est encore plus gratifiant. Puis ils sont venus nous voir à Marseille, il y a une vraie recherche de l’humain. C’est cool et impressionnant d’être validés par des artistes qu’on admire, et surtout par une grosse machine indépendante française.
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> Vous aimeriez bien refaire des choses avec eux ?
Oui carrément ! On est contents du morceau, d’ailleurs on ne l’aurait pas envoyé s’il nous plaisait pas, même si c’est pour Chinese Man. Mais oui comme ça s’est bien passé, pourquoi ne pas recommencer ?
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> Tout à l’heure vous disiez que vous mettez pas mal de temps pour composer. Comment se passe ce processus ?
Ce n’est pas forcément la phase de création pure qui prend du temps. Celle-ci est très spontanée. Quand Miscellaneous a un texte qui lui vient ou un thème, il est lancé et ça va assez vite. Bankal c’est pareil, faire une base de morceau, une boucle, c’est rapide. Après, une fois qu’on s’est mis d’accord et que le texte et l’instru vont bien ensemble, on sent qu’il y a du potentiel pour développer le morceau et c’est à partir de là que ça peut être très long. Ça devient plus cérébral, on se demande comment on va construire le morceau, quels seront les détails. C’est pour ça qu’on prend plus de temps. Je pense qu’en fait, ce sont des choses qu’on est les seuls à entendre d’ailleurs. Parfois on se prend la tête sur des détails alors que personne ne va capter le truc. Alors que nous quand on l’entend, on l’entend. Donc oui, ça peut prendre beaucoup de temps. Après, ça peut aussi être un morceau qu’on met de côté pendant six mois et sur lequel on revient dessus plus tard. On a besoin d’avoir un peu de recul sur des morceaux si c’est important, pour revenir avec une autre oreille. On travaille un peu comme des fonctionnaires de bureau en fait… Rien qu’à la fin d’une journée à travailler le morceau, tu en as plein la tête. Vers 16/17h, on ne sait plus trop où on en est. Et rien qu’après une bonne nuit de sommeil, on y voit déjà plus clair et on se rend compte de pas mal de choses. De la même façon, prendre quelques jours, semaines ou mois sur un morceau, ça peut permettre de voir des évidences qui, au bout d’un moment, ne l’étaient plus forcément.
> Vous avez deux parcours très différents à la base. Comment est née l’idée du duo ?
Miscellaneous : Je suis venu d’Angleterre, je suis né là-bas et je suis arrivé en France juste avant mes 13 ans. On s’est rencontrés plus ou moins à ce moment-là par le biais de mon cousin qui était son meilleur ami à l’époque. On a tout de suite accroché avec le rap et le basket et on était aussi dans le même collège. On avait une espèce de petit collectif. On avait un peu d’écart d’âge.
Bankal : Tu avais deux ans de moins.
Miscellaneous : On s’est un peu perdus de vue. T’es parti à Tours dans le scratch, moi je suis resté à Amboise. T’as fait des championnats, et moi j’ai continué à faire du rap dans des groupes. On s’est croisés une ou deux fois et on a eu des petites tentatives de collaboration.
Bankal : Oui il faudrait que je les retrouve celles-là ! On rappait en français.
Miscellaneous : Ensuite, c’est parti d’un soir via un ami en commun, on s’est revus, on s’est fait écouter ce qu’on faisait. Il m’a demandé quand j’allais sortir un album solo, et j’ai dit on a qu’à le faire ensemble. A ce moment-là, tu en avais un peu marre des compétitions.
Bankal : Oui parce qu’on prenait pas mal de choses existantes pour les déstructurer et les restructurer. Je n’avais jamais fait d’instru de A à Z donc j’avais bien envie d’essayer.
Miscellaneous : Notre premier morceau était Lost in the Sound, on a fait un clip, ensuite on a pensé à l’EP et voilà, tout découle de là.
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> Si vous avez d’abord commencé à rapper en français, pourquoi avoir voulu changer ?
Miscellaneous : En fait, au moment où je suis arrivé en France, c’était l’âge d’or et ça m’a beaucoup parlé, il y avait une vraie fraicheur. Et puis, je suis arrivé l’année où la France à gagner la Coupe du Monde de foot donc j’avais aussi envie de m’intégrer je pense. Mais en fait, ça a toujours sonné bizarre, c’est ce qu’on m’a dit. Je pense que c’est pour être plus à l’aise que j’ai eu envie de revenir à ma langue maternelle.
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> Rapper en anglais, je trouve que ça donne un côté plus musical.
Miscellaneous : C’est ce que j’entends, oui. C’est ce que les gens me disent.
Bankal : En tout cas, pour toi, oui c’est sûr. Ta musicalité quand tu rappes, on la sent vraiment évidente quand tu rappes en anglais. Je pense que quand tu rappes en français, comme tu es anglophone à la base, il y a peut-être un côté qui peut dérouter. Je pense que tu fais sonner le français, comme un français ferait sonner de l’anglais.
Miscellaneous : Oui, c’est moins naturel.
Bankal : De toute façon, je pense que ce n’est pas pour rien que beaucoup de groupes non-anglophones chantent en anglais, et ce quel que soit le style.
Miscellaneous : Oui c’est la langue qui sonne le mieux en musique. Et puis c’est une langue qui est un peu « batarde ». Elle vient de plein de choses, du latin mais aussi de plein d’autres trucs. Donc ce n’est peut-être pas pour rien qu’elle est plus musicale. Même au niveau des mots, elle est plus riche.
Bankal : En tout cas dans le rap, ça sonne beaucoup mieux pour faire des flow rapides.
Miscellaneous : Oui, c’est peut-être aussi parce que la culture française accorde beaucoup plus d’importance au texte qu’à la musicalité. Par exemple, il y a des groupes de pop anglophones, ils n’ont rien à dire, c’est naze au niveau du texte, mais ça sonne bien.
> Votre premier album Ego Trip est sorti en novembre dernier. Vous avez déjà de nouveaux projets pour la suite ?
C’est peut-être encore un peu tôt. On ne sait pas encore exactement ce qu’on veut concrètement. On commence à faire mais on ne sait pas encore sous quelle forme ni quand ça va sortir. Mais oui, on travaille de nouveaux morceaux et aussi le live.
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> Justement en parlant de live, vous faites beaucoup de festivals cet été, notamment Solidays, et vous allez finir au Trianon le 19 novembre. Comment abordez-vous la saison des festivals ?
Il va falloir allez vite. On voit tout ce qu’il y a à faire derrière le rideau, et c’est un peu l’usine dans les festivals. Donc je ne pense pas forcément au moment du concert, mais plutôt à la journée. Je pense qu’il va falloir aller plus vite. Après sur scène, je ne sais pas encore à quelle heure on va jouer aux Solidays, mais je pense que ça ne sera pas aux heures les plus attractives. Mais ça va être cool quand même, ça reste des plateformes où il y aura toujours du monde. Attends, attends… Je viens d’apprendre qu’on joue à 21h ! Waouh ! Pour le coup c’est cool ! En fait ça met un peu la pression, j’envisage la scène différemment ! (rires) C’est marrant moi je vois les choses comme ça : tu t’entraines sur toutes les petites scènes, et les festivals, c’est un peu les matchs. L’ambiance est totalement différente, les gens se lâchent complètement car ils sont en plein air, il fait beau, il y en a qui sont en vacances. Donc ça change totalement des salles. Mais après, comme a dit Oxmo Puccino quand on lui a demandé sa préférence entre les festivals et les salles, il a répondu « aucune. Les deux sont complémentaires ». C’est vrai que se sont deux choses totalement différentes mais qui sont tout aussi intéressantes. Ce n’est pas du tout le même rapport au public.
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> Du coup après le Trabendo, vous allez faire quoi, vu que c’est votre dernière date de programmée ? Vacances ?
Miscellaneous : Je vais essayer de faire un petit tour du monde. J’ai ma sœur qui vit à San Diego, et de la famille en Australie et je n’ai jamais trop le temps d’y aller plus de dix jours, alors je me dis que ça serait bien d’en profiter. Mais Chill Bump ne sera pas en pause non plus.
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Merci à Chill Bump pour le temps qu’ils nous ont accordé !
www.chill-bump.com
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Photos © Laure Clarenc