Au Printemps de Bourges, nous avons également participé à la conférence de presse organisée avec le duo The Dø ! Un échange placé sous le signe de l’humour, qui vient clôturer notre passage au festival !
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> Vous avez sorti votre troisième album, est-ce qu’il y a eu une évolution particulière dans votre travail, est-ce que vous avez changé votre façon de procéder ?
Olivia : Pas vraiment, ce sont plus les outils qui ont changé. Après, on continue à faire des chansons, toujours dans la même langue et je pense que c’est peut-être juste le temps de travail ensemble qui a un peu changé. Mais pour nous, depuis le début, c’est plutôt une suite logique.
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> Votre dernier album, vous l’avez composé uniquement sur ordinateur, est-ce que vous avez eu des retours négatifs, ou qui vous ont énervé, à ce propos ?
Dan : Déjà, tout le monde travaille sur ordinateur aujourd’hui. Je pense que si quelqu’un envoie un mail par courrier, ça ne marche pas. Mais là, c’est un peu le truc. Des retours négatifs, il y en a surement.
Olivia : Mais on ne les a pas retenus en fait.
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> Est-ce que vous avez des préférences entre le studio et la scène ?
Dan : Moi je suis plutôt le studio et Olivia plutôt la scène.
Olivia : Ce n’est pas si caricatural que ça, mais je pense que le temps de studio est souvent trop long et le temps de tournée est trop long. Il faudrait raccourcir les deux et qu’on profite des deux à fond. Mais moi j’aime vraiment les deux. Les deux sont complémentaires. Mais en général, c’est vrai, je suis celle qui se plaint en studio parce que j’ai envie de jouer des morceaux sur scène. Et puis une fois en tournée, on a envie de retourner en studio. On n’est jamais contents.
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> Vous êtes là au Printemps de Bourges, il y a beaucoup de jeunes groupes dans les petits salles. Je sais que vous aimez bien aussi jouer dans les petites salles… est-ce que vous avez pris le temps justement d’aller voir un peu tous ces groupes là, d’échanger avec eux ?
Dan : Malheureusement on est arrivés à midi, on a balancé à 13h00, là on sort de la balance donc non. Moi j’aimerais bien rester à chaque fois trois jours mais c’est impossible. Peut-être ce soir après notre concert. Avant c’est un peu plus difficile. C’est vrai que c’est un peu le défaut des festivals. Il y a beaucoup de groupes mais on ne peut pas tous les entendre, tous les voir.
Olivia : Après ça dépend des circonstances, il y a quatre ans on avait recroisé nos amis des Concrete Knive. Mais bon on n’a pas le temps, malheureusement, cette fois, pour cette année.
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> Est-ce que vous avez écouté des groupes en particulier, notamment de la scène anglaise, pour présenter un travail comme ça, avec des machines ?
Olivia : Pas vraiment de la scène anglaise en fait, plus des choses qui se font aux États-Unis et en Afrique du Sud, comme le groupe Die Antwoord, qu’on a beaucoup écouté et qui nous a un petit peu secoué. Beaucoup d’électro française aussi.
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> Et vous avez voyagé aussi pour ça ? Vous êtes allez voir les groupes ?
Olivia : Pas vraiment. Moi j’ai passé pas mal de temps à Berlin pendant l’écriture de cet album, mais en dehors de ça c’était surtout la Normandie.
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> Sur la pochette de votre album vous êtes menottés. Qu’est-ce que cela signifie ?
Dan : C’est vraiment un hasard. Pour s’amuser. On tournait un film qui va sortir et on s’était fait arrêter par un flic au bord de la route et on lui avait demandé de nous mettre ces trucs et la photo est restée.
Olivia : Ouais, c’est un accident. Je pense qu’on a choisi cette photo-là peut-être parce qu’il y a forcément une symbolique derrière tout ça, qui nous amusait. Le fait qu’on est un duo et qu’on est un peu tout le temps ensemble en studio et sur scène, en tournée. Qu’on le veuille ou non, on est voués à être ensemble et à faire de la musique pendant longtemps encore.
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> Vous avez reçu une Victoire de la Musique, quel est votre rapport à ce genre de prix ?
Dan : On est ravis. On est touchés. Pour le grand public c’est important. On rencontre des gens qui ne nous connaissaient pas forcément et ça veut dire beaucoup pour eux. Pour nous, recevoir une Victoire de la Musique Rock… On ne sent pas du tout un groupe de rock. Je pense que c’est une histoire de « nomation ». Il n’y a pas de groupe pop, ou duo, donc on a été rock. Mais c’est sympa. D’ailleurs c’est Olivia qui l’a.
Olivia : Ça donne un élan assez agréable, surtout quand on est sur la route et on le ressent beaucoup au sein de l’équipe aussi. Ça fait vraiment plaisir à toute l’équipe, donc ça nous soude encore plus et on s’aime encore plus.
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> Les musiques de film sont des choses importantes pour vous ? Est-ce qu’il y a un film dans l’histoire du cinéma pour lequel vous auriez aimé travailler ?
Dan : Un film dont j’ai adoré la musique c’est Casanova, composée par Nino Rota. Il n’y a pas que celle-là mais celle-là m’a donné envie de faire de la musique. On n’en a pas fait depuis des années. Si le projet est bien et si on a le temps de le faire… Le problème aujourd’hui c’est que on n’a pas le temps de faire d’autres choses vraiment à côté. C’est très compliqué. C’est à dire que les choses qu’on fait à côté, faut les prendre sur le temps off, en repos et comme on a deux jours par-ci, deux jours par-là, c’est un peu compliqué.
Olivia : Ça dépend des projets qu’on nous propose aussi, on peut s’arranger. Mais on aime bien. Ce genre de pas de côté nous a toujours nourri en fait.
Dan : Du coup moi je me réalise d’autres albums à côté. J’ai été très heureux de faire l’album de Jeanne Added et là de faire l’album de Las Aves. Je le fais dès que je peux, dès que je rentre.
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> Comment s’est formé votre groupe ?
Olivia : On s’est rencontrés en travaillant sur une musique de film et au début on n’avait pas du tout l’intention de former un groupe, mais ça s’est fait avec le temps, avec les chansons qui se multipliaient.
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> Et d’où vient votre nom de scène ?
Dan : C’est un accident je pense. Je pense que c’est le premier projet qu’on avait fait, c’était pas la musique de film, c’était de la musique pour danse contemporaine mais le compositeur finlandais voulait absolument vendre le disque à la sortie et il fallait qu’on trouve un nom et c’est The Dø. D’ailleurs j’ai une liste…
Olivia : En fait, avec nos initiales, il y avait soit The Dø, soit The Od, donc overdose (rires). Donc on n’a pas hésité longtemps.
Dan : C’est toujours compliqué. Après on a regretté pour dire la vérité, parce qu’on n’arrivait pas à nous trouver sur Internet. On s’est dit « c’est un peu con quand même, parce qu’il y a des groupes plus simples qu’on peut trouver ». Maintenant c’est trop tard. Il y avait le « ø » qui faisait le Do de la note. Mais c’est comme donner un nom à un chien, tu ne sais pas que le chien va devenir une star. C’est juste un chien, tiens voilà un chien, comment il va s’appeler… on va l’appeler Poppy.
> Est-ce que pendant que vous êtes en tournée et que vous entendez un peu ce qui se passe autour de vous, il y a des petits choses en terme de musique pour lesquelles vous vous dites « tiens ça m’intéresse bien… » qui pourraient donner lieu à des idées, des collaborations avec des artistes ?
Olivia : J’ai l’impression que c’est juste une constante. Après on aime bien Christine And The Queens, ça fait longtemps qu’on se connait et on s’est dit qu’on aimerait bien collaborer.
Dan : Moi je voulais faire un truc avec Gradur aujourd’hui. J’ai demandé à mon tourneur. Après on a vu que c’était un peu compliqué… Mais oui il y a des trucs. C’est surtout en terme de mise en scène qu’on peut voir des choses et se dire « ah ils ont eu l’idée de faire ça ». Par exemple, au Printemps de Bourges, on avait joué avec les Kooks et ils nous ont demandé après de faire un truc, qu’on a fait. Après il y a des relations qui restent aussi et donnent des choses. On est toujours en contact avec les Kills. Ça ne donne pas forcément de la musique, mais ça donne une amitié. On partage des choses avec des gens qui vivent la même chose que nous. C’est une communauté anonyme de musiciens.
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> Il y a beaucoup de femmes qui ont été programmées au Printemps de Bourges. Il y a eu notamment l’hommage à Nina Simone. La condition de femmes est un peu difficile en ce moment, mais alors la condition de femmes qui chantent est-ce que c’est encore plus difficile à gérer ?
Olivia : Moi je ne le ressens pas forcément. Oui c’est bizarre quand on me pose des questions par rapport à ma tenue de scène, si c’est féminin, pas féminin… La question de la féminité là-dessus parfois ça vient. Ça me surprend à chaque fois, parce que je trouve ça un peu étonnant. Mais moi je n’ai pas vraiment de problèmes avec ça. Je suis très sensible à la cause des femmes.
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> Vos albums sont relativement différents. Vous avez envie de faire quelque chose de différent à chaque fois ?
Dan : C’est juste un moteur et le moteur est qu’on n’a pas envie de se répéter et qu’on a envie de tenter des choses. Personne ne voit tout le processus de travail mais c’est vrai qu’on a beaucoup de mal à faire quelque chose qui pouvait ressembler à ce qu’on faisait avant. C’est le truc de la première fois en fait. Ça nous excite.
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> C’est quand vos meilleurs moments sur scène ?
Dan : A 5 minutes 40 (rires). Moi je kiff ce moment-là.
Olivia : Il y a des destinations qu’on adore, par exemple Istanbul, où on retourne dans pas très longtemps. Les festivals c’est à chaque fois un nouveau plaisir et c’est bien parce que ça ne dure pas très longtemps mais c’est très intense. Je pense qu’il ne faut pas que ça dure trop longtemps mais c’est une saison qui est très vivante. C’est bien de tester sa musique dans plein de contextes, que ce soient des petits clubs, des grandes salles, ou les festivals. C’est à chaque fois différent.
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> Quels sont vos disques de chevet, ceux que vous écoutez comme ça, à la maison, dans la voiture, au sport, en ce moment ?
Olivia : En ce moment, il y a un groupe que j’adore, Rae Sremmurd qui est un groupe de rap américain ; deux jeunes rappeurs qui n’ont presque pas finis de muer, donc ils ont la voix encore un peu cassée. C’est mon coup de cœur du moment.
Dan : Moi ça va paraitre contradictoire avec tout ce que je dis d’habitude, mais j’écoute beaucoup Charles Aznavour en ce moment. J’aime beaucoup Charles Aznavour. Il a du talent (rires). J’écoute que ça en ce moment. Dès que je rentre chez moi, je mets du Charles Aznavour.
Olivia : Et avant c’était Frank Sinatra.
Dan : Avant c’était Frank Sinatra, mais ça m’a un peu saoulé en fait. Peut-être que je vais faire de la chanson française bientôt. Je ne sais pas. Les textes me parlent, la musique me parle, les arrangements me parlent. C’est presque du Bob Dylan, mais ce n’est pas du Bob Dylan.
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> Le choix de la langue dans vos chansons, le parti-pris de chanter en anglais ou en français, comme là vous parlez de la chanson française, finalement est-ce que vous aimeriez aller vers un style, ou c’est plus ou moins aléatoire ?
Olivia : Moi je ne me suis jamais posée la question. L’anglais est ma langue musicale. Après, je pense que le français aujourd’hui c’est la future langue de la pop. J’ai une espèce de conviction comme ça. Je pense que je ne participerai pas à ce mouvement-là mais enfin il y a une façon de maltraiter un peu la langue, de jouer avec, de la désacraliser, de sortir du côté très traditionnel du songwriting français, de textes français, qui est peut-être un peu trop sacré et je pense qu’en ce moment il y a plein de choses assez palpitantes qui se passent.
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> Est-ce qu’avant de faire les grandes scènes vous avez fait comme les jeunes groupes qui sont là, à courir partout, les petites scènes, le tractage, accrocher vos affiches vous-mêmes ?
Dan : Malheureusement non.
Olivia : On a été un peu gâtés nous en fait. Après, moi je l’ai un peu fait quand j’étais ado, parce que j’avais des groupes. C’est vrai que c’est allé assez vite pour nous. On était vraiment un projet de studio au début, donc la question de la scène ne se posait pas. On n’avait pas spécialement envie d’aller jouer, on n’avait même pas de groupe, on était juste tous les deux, on s’enregistrait l’un l’autre. Un jour c’est notre tourneur qui nous a dit « dans deux mois je vous programme au Nouveau Casino ». Et là il a fallu se dépêcher.
Dan : Mais ça ne veut pas dire qu’on n’a rien fait avant. Il y a peut-être un chemin qui est différent. Pour mon cas, je n’ai jamais rêvé d’être sur scène, d’avoir un groupe. J’ai toujours voulu diriger un orchestre, faire de la musique de film. C’est un truc qui m’a toujours plu donc moi j’ai fait beaucoup de pièces de théâtre. Peut-être qu’en pièce de théâtre ça m’est arrivé de tracter. Mais sinon non, on n’a pas tracté. Peut-être que ça arrivera.
Olivia : Arrête !
Dan : Ça peut arriver. Tu peux arriver à ce que ça ne marche plus et que tu sois obligé d’aller coller tes affiches.
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> Qui sont les musiciens qui vous accompagnent sur scène ce soir ?
Dan : Ce sont toujours les mêmes depuis cinq ans et ce sont des musiciens qu’on aime énormément, qui s’appellent Marielle Chatain, Pierre Belleville et Bastien Burger. Ils font beaucoup pour notre musique. Ce sont des gens qui sont très ouverts aux changements et qui sont très bons musiciens donc on peut leur demander tout et n’importe quoi.
Olivia : On leur doit beaucoup oui.
> Pour la scène de ce soir, vous allez faire un mix des trois albums ?
Dan : En fait, c’est le premier festival donc la setlist c’est un peu la longue discussion. C’est une discussion qu’on a tous les jours, faut le savoir. Je me demande pourquoi il n’y a pas encore un film sur la setlist, ou un court-métrage, ou un sketch sur les musiciens qui parlent de leur setlist où il faut absolument arriver à 60 minutes, alors que là on tournait avec un set qui faisait 1h30. C’est très compliqué, faut faire le choix, il y en a qui aiment bien jouer celui-là, d’autres non et d’autres qui disent « on va se faire chier à ce moment-là », ça c’est pour les fans ce n’est pas pour un public de festival… J’ai l’impression qu’à force on ne sait plus qui est le public de festival et des fois on est surpris nous-mêmes. C’est à dire que le public de festival est venu pour un autre groupe ou découvre, ou veut venir écouter trois chansons. S’il veut partir, il a le droit de partir, s’il veut rester, il a le droit de rester… on oblige personne. Donc la setlist c’est un peu toujours un casse-tête. Un vrai casse-tête. Il y a des choses à une minute près qui ne peuvent pas rentrer dans le set, après il y a des histoires de tempo… Donc c’est drôle, c’est toujours sujet à discussion. On va encore changer deux minutes avant de monter sur scène, donc c’est drôle.
Olivia : Mais ce soir ce sera un mélange. On défend plus le troisième album évidemment, c’est ce qu’on aime jouer aujourd’hui. Mais il y aura un peu des anciens aussi.
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> Est-ce qu’il y a une chanson que vous n’avez pas du tout envie de jouer ?
Dan : Oui, il y en a qu’on n’a jamais joué ou qu’on a joué juste au début. C’est normal, c’est comme des affaires en fait. Des fois vous n’avez plus envie de mettre cette chemise, vous l’avez trop porté. Je pense qu’il y a un truc comme ça.
Olivia : Mais on ne va pas citer de titres en particulier.
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> Est-ce que vos paroles sont purement imaginaires ou elles sont tirées de vos expériences ?
Olivia : C’est toujours la graine, c’est toujours très personnel. Ça part d’une source très personnelle mais je fais en sorte que ce ne soit pas quelque chose qui soit juste un journal intime. Donc ça part d’une expérience personnelle et après c’est l’imagination qui fait le reste.
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Merci au duo pour ce bon moment !
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Photos © Laure Clarenc