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Rencontre avec Lior Shoov ! #pdb15

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Nous avons rencontré Lior Shoov quelques heures après son passage sur la scène du Printemps de Bourges, pour découvrir plus en profondeur son univers musical singulier.

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     > Tu viens de passer sur scène au Printemps de Bourges. Ça s’est bien passé ?

Oui, je pense que ça s’est bien passé. Pour moi c’était particulier. Enfin, à chaque fois c’est particulier en fait.

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     > Tu fais beaucoup de concerts partout dans le monde, mais pas toujours dans des salles de spectacles. Pourquoi ce choix ? C’est pour te sentir plus proche des gens ?

En fait, quand j’ai commencé la musique, je jouais dans la rue. Et oui carrément, c’est pour être proche des gens, mais pas seulement. Je trouve que la rue c’est génial pour jouer, c’est une école incroyable pour apprendre plein de choses sur les êtres humains, mais aussi sur comment communiquer à travers le jeu. Et la rue, c’est aussi un endroit de recherche pour moi car comme les gens ne payent pas leur billet, on peut faire ce que l’on veut. C’est le cas pour la rue, pour les cabarets, le cirque, les chapiteaux, les églises, les chapelles, les écoles… Toutes sortes de lieux.

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     > Quel est l’endroit le plus improbable dans lequel tu aies joué ?

J’ai joué plusieurs fois dans les toilettes. C’était très informel ! (rires) Mais sinon le plus improbable, c’était peut-être un concert à 06h00 avec le soleil qui se lève après une grosse nuit blanche. C’était à La Châtre, donc pas très loin d’ici. On était une quarantaine de personnes dehors. C’est ce moment qui me vient à l’esprit là.

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     > Le partage humain a l’air de beaucoup inspiré ta musique, non ?

Les rencontres, oui. Les rencontres avec des voyageurs, avec des gens curieux qui se posent plein de questions sur qui ils sont, et qui je suis dans cette vie, des gens avec qui je peux partager des choses. Le voyage m’a beaucoup influencé. Ce n’est pas forcément en passant par les écrans ou par internet, même s’il y a aussi beaucoup d’informations et de partage qui passent là-dedans, mais ce sont vraiment les vraies rencontres, le temps qu’on passe l’un avec l’autre qui m’a beaucoup influencé. Je n’ai pas fait de formations ou d’écoles, j’ai appris la musique en rencontrant des gens, surtout les gens qui jouent, qui ont leurs instruments dans leurs poches, ou du moins avec eux.

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     > Alors justement, toi tu inventes des instruments à partir d’un petit peu tout ce qui te passe sous la main (des jouets, des mignonnettes d’alcool…). D’où te vient cette idée de détourner ces objets pour en faire sortir des sons à intégrer à tes morceaux ?

Je ne sais pas… Ça vient peut-être de mon envie de créer et de jouer avec la matière, avec les choses. De jouer comme un enfant joue. J’aime beaucoup les sons en général, et chaque chose à un son propre : une bouteille a un son, un sac en plastique en a un autre, les bruits des assiettes aussi, le flash des caméras… Je suis attirée par ces sons. Plus j’avance, plus j’ai envie de jouer avec ce qui est là, même si je ramène avec moi plein de bagages.

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     > Ça offre des possibilités sonores infinies.

Oui ! Et c’est aussi une invitation à être là, avec le public, à se laisser prendre dans la musique. Faire d’autres sons, ça invite à une autre écoute, ça invite les gens à être là avec moi.

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     > Du coup, est-ce que pendant les concerts le public participe à ta musique en faisant des sons avec les objets qui sont à proximité ?

Ça dépend de l’endroit et du contexte. Il y a des concerts ou les gens veulent s’ouvrir, et d’autres qui sont plus classiques, plus organisés, et où c’est moi qui invite les gens à s’ouvrir. En tout cas, s’il y a une sensibilité et une écoute, tout est possible, mais si les gens sont là juste pour faire du bruit, ça ne m’intéresse pas.

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     > En ligne, on trouve ton album Just a Moment, mais apparemment, il n’est pas disponible en physique. C’est ça ?

En fait, on peut le trouver sur des sites mais ce n’est pas vraiment un album. Quand je jouais dans la rue, c’était des enregistrements que je vendais. Ça date d’il y a six ans maintenant. Donc non, je n’ai pas encore sorti de vrai album. Je vais enregistrer quelques titres cet été, mais sinon ça se joue beaucoup sur le live. Ce qui m’attire, ce sont les spectacles vivants. La musique doit rester vivante, ça doit bouger. Du coup faire un disque qui fige les choses, c’est une contrainte pour moi. Alors il faut que ça vienne petit à petit. Là, ça fait sept ans que je joue live et je n’ai presque rien sorti, je suis peut-être prête à sortir quelque chose. Mais il me faut de la liberté. Il faut que je me permette d’écouter l’instant présent pour savoir qu’est-ce que ça m’inspire.

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     > Comment vas-tu aborder le futur enregistrement de tes titres ? Est-ce que tu vas essayer de conserver un aspect un peu live ?

Bonne question… Je pense que je vais partir sur deux pistes : une où je vais enregistrer des concerts live, et une piste avec un ami qui va m’aider à arranger les titres et à les réorchestrer un peu. On va essayer de mettre plus d’instruments, plus de voix, mais tout en conservant cet aspect sensible, nu, brut et personnel. Je pense qu’on va partir dans une recherche car c’est assez ouvert.

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     > Tu voyages beaucoup à travers le monde. Est-ce que tu as eu un public coup de cœur par rapport aux différents pays que tu as pu visiter ?

Là je voyage un peu moins, je suis basée à Paris depuis quatre ans. Mais non, je n’ai pas de public que je préfère. Ça ne marche pas comme ça pour moi. A chaque fois, c’est plutôt une vraie rencontre avec les gens. Des fois il y a des rencontres où on est plus ouverts, d’autres où on est plus timides, il y a des rencontres où on se cherche… La curiosité, elle est là. Je ne joue pas pour un public ou un autre, j’invite les gens à rentrer dans un lâcher-prise avec moi mais tout en restant sensibles. Ce n’est pas un lâcher-prise où tout le monde devient fou. Après c’est toujours différent, que ce soit en Israël, en Espagne, en France ou que ce soit à Paris ou en province. Chaque endroit a sa propre énergie et sa propre couleur. En Israël c’est encore autre chose parce que je joue aussi devant mes parents, mes grands-parents…

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     > Comment est la culture musicale en Israël ?

Les musiques que j’écoute là-bas, ce sont des musiques indépendantes et alternatives. Je trouve qu’il y a de très belles choses, mais qu’on entend rarement ici. Il y a des gens qui cherchent leur chemin, qui font des trucs assez folk, il y a aussi de l’électro… Il y a vraiment de tout en fait, c’est très ouvert. Et c’est dommage ici en France, on entend que des choses négatives sur l’Israël, alors qu’il s’y passe aussi de belles choses. Mais la culture musicale en elle-même est très vaste, comme en France.

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     > C’est ton pays d’origine, alors est-ce que la musique israélienne t’influence ?

Non pas tant que ça. Je suis très influencée par Björk, Ali Farka Touré, la musique des années 70, ou le folk-indie américain. Après, il y a aussi les musiques africaines. Mais c’est surtout les rencontres qui m’influencent, et ça j’en fais beaucoup en Europe. Ce sont les gens qui font leur musique à leur sauce, qui aiment ça et qui se moquent de quel style ils font. Moi je m’en fous du style, l’important c’est qu’il se passe quelque chose, qu’il y ait une vraie intimité avec les mots, la voix et l’instrument. Du coup non, je ne suis pas très influencée par la musique israélienne. Après, il y a des choses que j’aime beaucoup mais plus des vieilles choses des années 40 ou 50.

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     > Il y a des endroits un peu originaux dans lesquels tu aimerais jouer ?

Oui ! Je ne sais pas si c’est original, mais j’aimerais bien pouvoir jouer dans une salle de danse, dans des salles de théâtre ou dans des salles en règle générale qui sont atypiques. Pas forcément dans des salles de musique en fait, mais plutôt dans des endroits où les choses se mêlent, où c’est l’expression qui prime. Après on peut passer par la musique, par le chant, par le théâtre, par l’improvisation ou juste par l’état de présence proche de la danse. C’est vers ça que je veux aller, vers des endroits où les arts et les choses se mélangent, où les gens sont là par terre, à l’écoute.

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     > Toi-même tu testes un peu ces différents arts. Je crois que tu joues dans un spectacle théâtral en ce moment ?

Oui. C’est un spectacle à deux avec Anne Kaempf. On a joué là au théâtre de la Cité Internationale à Paris. C’est un spectacle très particulier que j’aime vraiment beaucoup. C’est physique pour nous, c’est émotionnel. C’est un travail qui est très proche de celui d’un clown, mais le clown au sens nu du terme, dans l’idée qu’on est très présents. C’est une histoire pas très narrative sur une rencontre entre deux personnes. Il n’y a pas de scénographie, il y a que nous et on fait un peu de musique, de danse, d’improvisation et de chant. C’est génial, c’est complètement autre chose. C’est un endroit où justement je ne suis pas moi-même et où je ne suis pas collée à ma propre image. On s’oublie totalement, on lâche prise et on y va sans vraiment savoir qui on est.

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     > Est-ce que tu as d’autres projets comme ça, hors de la musique, qui t’intéresseraient ?

Sûrement oui, mais là comme ça je ne sais pas trop. Ces deux projets me prennent déjà beaucoup de temps : le mien et le duo. D’ailleurs, on joue aussi le duo dans la rue. C’est super parce que c’est vrai que maintenant je commence à avoir un peu de mal à jouer dans la rue parce que ce que je fais est très silencieux. Même si j’ai encore envie de retourner dans la rue, les RER ou le métro parce que c’est très important et actuel de nos jours, car il y a des écrans partout. J’aime jouer et être avec les gens. Mais s’il y a un truc que j’aimerais bien faire, c’est retourner jouer dans des espaces imprévus.

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Merci à Lior Shoov pour ses réponses !

liorshoov.com/fr
www.facebook.com/pages/Lior-Shoov/126165420738714
 

Photos © Laure Clarenc

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Etudiante, je suis une passionnée d'art, et plus particulièrement de musique et de cinéma. Attirée par le milieu du journalisme et de la communication, j'aime partager mes petites découvertes artistiques avec les autres.

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