Le Printemps de Bourges a également été l’occasion d’échanger avec Laura Cahen, juste après son concert au W, qui a réuni 8000 personnes. Pour nous, elle revient en détail sur son parcours, la réalisation de son dernier clip et ses projets futurs…
.
> Ton concert au Printemps de Bourges est déjà passé. S’est-il bien passé ? Pas trop stressant ?
Oui, il s’est très bien passé. C’était au W. Et si c’était très stressant. J’étais seule face à 8000 personnes, avec ma petite guitare. Mais ça s’est bien passé.
.
> En parlant de concert, dans une autre interview tu disais que tu avais été très marquée par une tournée en Chine. Qu’est-ce qui t’a marquée ?
Oui. Tout m’a marquée. La Chine c’est vraiment très dépaysant, parce qu’il n’y a rien en commun avec la culture occidentale, vraiment, c’est très éloignée. Je pense qu’on ne peut pas s’imaginer tant qu’on n’y est pas allé. Et puis je suis inconnue en Chine, mais à Canton, je me souviens, il y avait des affiches de la taille du mur. C’est-à-dire des 4×3 dans la rue, de moi. Du coup il y avait du monde à chaque concert et quasiment complet presque à chaque fois. Et c’était impressionnant de se retrouver au bout du monde, moi, comme ça, avec mes petites chansons, et que ce soit complet partout. Huit concerts et puis on a fait un vrai tour donc en plus d’être une tournée de concerts, c’est vraiment un voyage où l’on découvre un autre pays, une autre culture.
.
> Tu as préparé tes concerts différemment ?
Non, il ne faut surtout pas changer la musique. En revanche j’avais appris quelques phrases en Chinois pour parler un petit peu avec les gens. Notamment pour me présenter en Chinois, présenter mes musiciens, dire deux/trois trucs. Je pensais que c’était important.
.
> Comment t’étais-tu retrouvée à faire une tournée là-bas ?
C’est une tournée avec les alliances françaises. Ce sont les connexions. Et c’est ma bookeuse qui a trouvé ça. D’ailleurs on a rencontré, lors de cette tournée, une femme qui était en train de préparer une entreprise d’échanges culturels avec la France, en dehors des alliances françaises et qui vient de nous re-téléphoner pour organiser une tournée. On ne sait pas vraiment si ça va se faire mais il est possible qu’on y retourne et ça me met en joie.
.
> Il y a d’autres pays dans lesquels tu aimerais jouer ?
Bien-sûr, j’aimerais jouer partout. Mais j’ai joué déjà dans pas mal d’endroits. J’ai fait quelques tournées au Canada, pendant la dernière on est allé aussi aux Etats-Unis, on a joué à New-York. Et à Saint-Pierre-et-Miquelon, que j’aime beaucoup et où j’ai envie de retourner vraiment beaucoup. Après en Europe : Angleterre, Allemagne, Italie. On a fait une tournée de 18 dates en Italie, puis la France, la Chine… Mais là l’album vient de sortir au Japon aussi, donc pourquoi pas aussi le Japon ?
.
> Quand tu étais en Chine, est-ce que tu avais le temps et l’envie d’aller voir des concerts ?
Alors nous n’avons pas du tout eu le temps. On a un peu eu le temps de se promener, mais pas de voir des concerts non malheureusement. Et puis ce n’était même pas des co-plateaux, on jouait tout seul.
.
.
> Tu as évoqué Saint-Pierre-et-Miquelon. C’est là où tu as tourné ton clip. Comment cela s’est-il passé ?
Merveilleusement bien. J’ai eu très froid donc c’était des scènes assez courtes. J’y étais allée dans le cadre d’une tournée au Canada où on s’était arrêté un petit peu à Saint-Pierre-et-Miquelon, avec une date à Saint-Pierre et une date à Miquelon et déjà, à ce moment-là, les gens étaient très accueillants et ils nous ont organisé une balade pour aller voir les baleines et aussi les oiseaux, ce que je ne savais pas. Parce qu’il y a une île, qui s’appelle l’Île du Grand Colombier, entre Saint-Pierre et l’Anglade, qui est attachée à Miquelon, où il y a dessus, au printemps et à l’été, un million d’oiseaux. Il y a plein d’oiseaux blancs qui volent autour, comme dans les boules de neige qu’on retourne. Je n’avais jamais vu ça et ça m’a vraiment époustouflée donc quand je suis revenue de cette balade j’ai dit au directeur du centre culturel « qu’est-ce que c’est beau chez vous, j’aimerais tellement faire des images ici, ça reflète vraiment l’album que j’ai fait, ce sont des images que j’ai dans la tête, c’est incroyable ». Je disais ça un peu en rêvant, parce que quand même c’est loin, on ne va pas faire un clip à Saint-Pierre-et-Miquelon, ce serait complètement hors budget et sur-réaliste. Et puis il m’a dit : « mais si, c’est tout à fait possible, on est justement en train de lancer un appel à projets avec la collectivité territoriale, pour des résidences d’artistes et notre but c’est de mettre en valeur l’île, que ça donne envie aux gens de venir donc peut-être qu’un clip ça peut tout à fait marcher ». Et en effet, on a réussi cet appel à projets. On a été retenu. Et donc on y est allé en janvier et on est arrivé sans vraiment préparer. On était quatre : deux réalisateurs, une régisseuse et moi. On avait une idée de ce qu’on allait faire mais on n’avait pas pu repérer les lieux avant parce que j’y étais allée seulement cinq jours mais pas dans l’idée de faire ce clip. Donc aucune possibilité de repérage, dix jours de tournage, aucune maquilleuse, pas d’accessoires, juste ma robe et mes chaussures. On s’est demandé comment se préparer, on ne savait pas. Et sur place, un bonheur absolu, un excellent accueil. On a trouvé une maquilleuse qui m’a maquillée tous les matins gracieusement, des gens qui nous ont emmenés partout en voiture et les figurants ont été très faciles à trouver. Tout était vraiment facilité. Les gens laissent leur clé sur leur porte, il y a vraiment une entraide et une confiance dont on n’a plus l’habitude du tout de voir par ici. Et c’était agréable.
.
> Donc c’était aussi une grosse expérience humaine du coup…
Complètement. Par contre j’ai eu très froid. C’est un climat très rude. Il faisait entre 0°c et -5°c mais ressenti avec le vent, il faisait -25°c.
.
> Ton album Nord est sorti il n’y a pas longtemps. Au niveau des retours, es-tu satisfaite ?
Oui, je ne pouvais pas espérer mieux.
.
> Et au niveau de la suite, prépares-tu d’autres clips ou te focalises-tu sur les festivals, les concerts ?
Là on est un peu concentré sur la tournée oui. Mais en effet il faut que je prépare d’autres clips mais je n’ai pas encore l’idée. Après avoir fait ça, ça m’a tellement touchée, émue, demandé du corps et de la présence que là je n’ai pas trop d’idée pour la suite, mais je vais en avoir.
.
> C’est toujours toi qui décide de quel clip tu vas faire ?
Oui. Pas toute seule, j’ai des propositions, mais oui, bien-sûr.
.
.
> L’album, tu l’as pensé en quatre chapitres, comme les quatre saisons…
Oui il y a des chapitres. Chaque chanson je les ai pensées comme des tableaux, sans vraiment d’histoire, plus des images, des émotions et pour les relier ensemble j’ai imaginé un fil qui correspond à ces chapitres.
.
> L’été noir c’est un peu sombre…
Moi ça me fait penser à du thé (rire). C’est un peu sombre oui, mais c’est parce que j’avais envie de séparer un peu l’ombre de la lumière dans ces chapitres. J’ai une chanson qui s’appelle Ça dépend des saisons, qui est très lumineuse et à côté j’ai une autre chanson qui s’appelle Je sombre et qui est très dark et je ne savais pas trop comment les coller ensemble et il y a eu cette idée de séparation. Mais l’été chez moi est assez mélancolique donc noir. Le printemps est rouge, un peu feu. C’est un peu guerrier.
.
> Le maquillage que tu fais a-t-il une symbolique particulière ?
Oui. Il y a une histoire de personnage mais il vient de plusieurs choses. J’ai envie, dans cet album, dans ces concerts, de donner une notion de marche un peu guerrière et donc d’être dans un personnage de femme apache, amazone… Il y a aussi l’idée de l’oiseau noir, un peu Black Swan, et puis ça fait aussi référence, pour moi, aux femmes berbères, qui se faisaient des maquillages noirs et qui retrace, finalement, l’histoire de ma famille qui a migré du sud vers le nord et donc ses racines du Maghreb, du désert… C’est sur les yeux et c’est aussi l’inverse de la burqa et j’aime bien cette idée.
.
Merci à Laura Cahen pour sa disponibilité ! A noter que l’artiste sera en concert au Café de la Danse, à Paris, le 16 mai.
Photos © Margaux CHETTEAU et Laure CLARENC